Exercice d’éloquence / Deux avocats « s’affrontent » devant le Préfet de Yamoussoukro et des étudiants

L’activité phare du Barreau de Côte d’Ivoire de la quatrième édition de « Avocats dans la cité » s’est déroulée à la salle des fêtes de la mairie de Yamoussoukro, le 19 juin 2025. Ce sont deux avocats entièrement en phase avec le sujet du débat qui ont entretenu le public composé d’étudiants de l’Institut National de Formation Judiciaire et des autorités de la ville.
» Faut-il garder l’œil ouvert ? », c’est sous ce thème que deux avocats du Barreau se sont affrontés en présence du Préfet de Yamoussoukro et des autorités policières. Les étudiants de l’INFJ et le public présent ont été édifiés sur le caractère polysémique du sujet. Après les présentations de Me Momboye, Secrétaire de Conférence et de Me Binta Bakayoko, qui a dit tout le bien qu’elle pense des deux avocats en lice, la joute oratoire pouvait débuter.

Pour Me Souhalio Diomandé qui défendait la thèse du sujet, il est absolument important de garder l’œil ouvert. C’est pour lui le signe de la vigilance. Une vigilance de tous les jours dans un contexte où des attaques peuvent survenir de partout. Me Diomandé estime par exemple que pour les avocats ne pas avoir l’œil ouvert, c’est ouvrir la porte à des erreurs. Des erreurs qui pourraient leur faire perdre des procès et mettre à mal les biens ou la vie de leurs clients.

Me Diomandé affirme que l’on doit garder l’œil ouvert par ses temps de trahisons en politique. Citant des exemples en France, l’avocat a montré qu’il faut se montrer vigilant avec son entourage proche pour éviter des surprises désagréables. Selon lui en politique, on ne dort que d’un œil, se référant à une citation de feu Félix Houphouët-Boigny. » Notre monde nous demande d’être perpétuellement éveillés « , a conseillé Me Diomandé, prévenant que l’œil fermé est le signe de l’obscurantisme.
Qui d’après son raisonnement peut détruire une famille ou un pays tout entier devant des failles sécuritaires. Me Diomandé a pris un exemple sportif pour expliquer la victoire des Eléphants à la CAN 2023. Pour l’avocat, c’est parce que les pachydermes ivoiriens ont « fermé l’œil » qu’ils sont passés à côté d’une élimination retentissante. A l’en croire, c’est parce que ces derniers ont, après, ouvert les yeux qu’ils ont pu se ressaisir et continuer leur aventure.

Défendant l’antithèse du sujet, Me Lamine Kouyaté a justifié sa prise de parole par le fait que le débat intellectuel est incompatible aux certitudes. Ainsi, s’il n’est pas totalement opposé à ce que l’œil reste ouvert, il s’est évertué à placer la confiance au centre des relations humaines. Parce que rien de durable ne peut se faire sans confiance, l’avocat recommande que chacun renonce momentanément à son égo pour voir en l’autre un partenaire.
Me Lamine Kouyaté plaide pour un monde où la confiance est une vertu cardinale. En sus, il estime qu’ il faut faire la différence « la méfiance rationnelle et la méfiance irrationnelle ». On peut faire preuve de prudence pour éviter des écueils, mais s’enfermer et tomber dans la paranoïa est dangereux pour l’individu et la société. Car ce dernier n’écoute plus, ne voit plus autre chose que ce que lui indiquent ses peurs et appréhensions.

Un homme seul est celui qui est mal accompagné, a déclaré Me Lamine Kouyaté pour amener les uns et les autres à s’ouvrir à l’extérieur. Pour Me Kouyaté, il est possible d’ouvrir l’œil en étant prudent, mais au final il faut faire confiance en l’homme en face. A titre d’exemples, l’avocat a indiqué que c’est par la confiance que chacun se faire conduire par un chauffeur sans savoir les intentions de ce dernier. C’est aussi en faisant confiance aux conducteurs des véhicules en commun que des millions de personnes voyagent chaque jour.
Me Lamine Kouyaté a terminé en prenant l’exemple du pessimiste et de l’optimiste devant le coucher du soleil. Alors que le premier y voit l’imminence des terreurs de la nuit, l’optimiste voit dans le coucher du soleil la promesse d’un espoir nouveau, d’une aube nouvelle. Prudence et confiance peuvent aller de pair, s’est-il convaincu.

A sa suite, Me Florence Loan-Messan a remercié les autorités de la ville pour leur implication dans la réussite de « Avocat dans la cité ». Saluant l’engagement personnel du maire de la ville, elle a promis revenir en 2025 avec son équipe.
