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Côte d’Ivoire / Validation de la candidature d’Alassane Ouattara : Yamine Ouégnin s’insurge et allume le Conseil Constitutionnel

Silencieuse depuis un moment, Yasmin Ouégnin député de la Commune de Cocody s’est enfin prononcée sur l’actualité sociopolitique qui prévaut dans son pays la Côte d’Ivoire. Elle a exprimé son indignation vis-à-vis de la décision du Conseil Constitutionnel de faire du Président de la République, Alassane Ouattara candidat pour l’élection présidentielle prochaine. Selon elle, le Conseil Constitutionnel a piétiné le droit en rendant éligible Alassane Ouattara.

C’est le mardi 15 septembre, sur son compte Facebook que l’honorable Yasmine Ouégnin a lancé son message aux Ivoiriens et aux autorités gouvernementales.

Vous trouverez ci-dessous l’intégralité de son discours.

Depuis son allocution du 6 Août 2020, veille de la célébration des 60 ans de notre pays, le débat sur la candidature du Président sortant à l’élection présidentielle du 31 octobre de cette année, a exposé un bien dangereux clivage entre Ivoiriens.

Par respect pour les Institutions de la République, notamment notre Conseil Constitutionnel, je me suis volontairement abstenue de tout commentaire, attendant que les membres de cette haute instance puissent trancher la question.

Par Décision N°CI-2020-EP-009/14-09/CC/SG du 14 septembre 2020 portant publication de la liste définitive des candidats à l’élection du Président de la République du 31 octobre 2020, le Conseil Constitutionnel a rendu publique la liste des candidats éligibles à l’élection présidentielle prochaine.

Si cette décision met fin à la controverse d’un point de vue juridique, elle ne vide pas pour autant de leurs contenus, les nombreuses récriminations politiques et contestations sociales qui n’ont cessé de prospérer, depuis l’annonce de sa volonté de briguer un 3ème mandat par Monsieur Alassane OUATTARA. Cette déclaration de candidature a, malheureusement, produit ses premiers effets nocifs, dès la mi-août 2020, créant un contexte préélectoral inédit des plus délétères.

A cet égard, comme tous mes concitoyens épris de Paix, je voudrais regretter, ici, les violences enregistrées, depuis plusieurs semaines sur l’ensemble du territoire national. Celles-ci, hélas, mettant à mal la Paix et la Cohésion sociales, se soldent par de nombreuses pertes en vies humaines ainsi que de multiples blessés et de lourds dégâts matériels. Ce bien triste bilan rend compte d’un environnement socio-politique trouble dont nous aurions pu faire l’économie.

Pour mémoire, la pierre d’achoppement entre le désormais candidat Ouattara et les voix s’opposant à son initiative, se situe dans l’interprétation que l’on devrait avoir de la Constitution de notre pays, relativement à la possibilité de requérir les suffrages de la Nation, une 3ème fois comme Président de la République.

L’on se souviendra qu’au moment de l’élaboration de cette Constitution, en 2016, la « Recherche de la Stabilité et de la Paix » fut l’argumentaire principal qui motivait ce nouveau pacte républicain, soumis à l’approbation du vaillant peuple de Côte d’Ivoire.

Subodorant une éventuelle manœuvre du Président de la République, en vue de conserver le pouvoir au-delà des limites admises par la Constitution en vigueur depuis le 1er août 2000, les divers doutes et inquiétudes, exprimés ici et là, se sont vu invariablement opposer l’impossibilité juridique d’une telle démarche, renforcée par les assurances et l’engagement ferme du Chef de l’État, à respecter le principe de la limitation de mandats, tel que consacré depuis maintenant deux décennies.

Au demeurant, l’exposé des motifs du Commissaire du Gouvernement devant le Parlement, ainsi que les déclarations officielles et les commentaires subséquents, à travers divers supports médiatiques, ont sans doute aucun contribué à rassurer les électeurs qui ont ainsi, dans une très large mesure, approuvé ce projet de Loi portant Constitution, à l’occasion du Référendum du 30 octobre 2016.

Pour ma part, plutôt que de se présenter comme un instrument indispensable à la consolidation de la Démocratie, nécessaire à l’Unité nationale et seul à même d’assurer la Paix, ce projet m’est paru comme le fruit de calculs bien trop intéressés et partisans. C’est pourquoi je m’y suis résolument opposée et j’ai voté « NON » lors de son adoption à l’Assemblée nationale.

Maintenant que les dissensions entre anciens alliés, ainsi que les désaccords profonds survenus au sein des dynamiques de clans ont pris le pas sur l’intérêt national, le fruit a un goût bien amer qui porte une charge toxique dont les effets pernicieux sont déjà perceptibles.

En effet, moins de 4 années après son entrée en vigueur, cette Constitution, réaménagée à la hussarde au premier trimestre 2020, vient de faire l’objet d’une interprétation autorisant table rase du passé électoral du Président sortant, car supposée ouvrir une ère nouvelle, celle de la « 3ème République », qui offrirait alors à Monsieur Alassane Ouattara, une autre occasion de solliciter les suffrages des Ivoiriens, au mépris du principe de la limitation du mandat présidentiel à seulement deux exercices.

C’est pourquoi, tout en regrettant les motifs exposés par le Conseil Constitutionnel, je dénonce ouvertement cette violation flagrante de notre Loi fondamentale dont ses membres se rendent complice. Par ailleurs, l’exclusion de personnalités politiques de poids ainsi que la caporalisation des différents organes en charge du processus électoral, finissent par donner plus de relief à cette forfaiture qui malheureusement fera date.

La validation illégitime de la candidature du Président sortant s’inscrit, assurément, dans une logique de préservation des acquis d’un groupement politique au détriment de l’intérêt général, dont le Président de la République devrait pourtant demeurer le garant. Le contrôle juridictionnel lui a certes été favorable, mais il n’en demeure pas moins que, déjà, le Peuple lui a retiré sa confiance.

Je reste persuadée que notre Pays mériterait de voir préservés ses standards démocratiques si douloureusement acquis. Cela ne peut se faire sans un sursaut de toutes ses filles et de tous ses fils qui seront capables de mettre en synergie ressources idoines et actions pacifiques afin de faire barrage à la confiscation de leur souveraineté.

C’est seulement ainsi que nous aboutirons à un processus électoral inclusif, régulier et absolument transparent par lequel le brave Peuple Ivoirien désignera, dans les urnes, Celui ou Celle qui sera digne de recueillir la majorité de ses suffrages.

Yasmina OUEGNIN

Députée de Cocody.

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